Avant réception : l'assureur ne couvre pas la perte de l'ouvrage due à une inexécution par l'assuré de ses obligations
Une entreprise, chargée de la construction d'une maison, est assurée par une police couvrant, avant réception, la perte de l'ouvrage telle que régie par l'. En cours de travaux, un bureau de contrôle rend un rapport établissant diverses malfaçons affectant la solidité et la stabilité de l'ouvrage. Une démolition est préconisée.
Le maître d'ouvrage pouvait-il demander la condamnation de l'assureur ?
Non. Bien que l' dispose que « si, dans le cas où l'ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d'être livrée, la perte en est pour l'ouvrier, à moins que le maître ne fût en demeure de recevoir la chose », la Cour explique que cet article n'a pas vocation à s'appliquer dans le cas où la perte ou la détérioration de la chose est due à l'inexécution fautive des obligations de l'entrepreneur. En outre en l'espèce, la police d'assurance, comportant une garantie « dommages à l'ouvrage en cours d'exécution », ne pouvait être mobilisée qu'en présence d'un dommage résultant d'un événement couvert par la garantie (effondrement, tempête ou incendie, par exemple) dont l'origine serait aléatoire. Cette condition faisait défaut. En l'espèce la menace d'effondrement découlait, non pas d'un aléa du chantier, mais d'une inexécution fautive du marché d'entreprise.
Cass. 3e civ., 13 octobre 2016, n° 15-23430.
Prescription la faute dolosive engage la responsabilité de droit commun du constructeur
Un exploitant confie à une société la construction d'un parc de stationnement. Plus de dix ans après la réception des travaux, une inspection du parc révèle d'importants désordres de fissuration au droit des poutres supportant les planchers et la paroi moulée. L'exploitant du parking recherche alors la responsabilité contractuelle de droit commun de l'entreprise, prétendant qu'elle a commis une faute dolosive.
Les juges du fond pouvaient-ils retenir une telle faute ?
Oui. L'ouvrage comportait de nombreuses non-conformités aux règles de l'art. L'entreprise de construction, n'ayant pu méconnaître la fragilité de l'ouvrage et la défaillance systématique des appuis, avait dissimulé des anomalies d'une particulière gravité au regard du risque d'effondrement avéré et commis une faute dolosive de nature à engager
sa responsabilité contractuelle. Cet arrêt souligne que tout constructeur, malgré la forclusion décennale, est, sauf faute extérieure au contrat, contractuellement tenu à l'égard du maître d'ouvrage de sa faute dolosive lorsque, de propos délibéré même sans intention de nuire, il viole par dissimulation ou par fraude ses obligations contractuelles (). Cette action se prescrit selon les règles de droit commun ().
Cass. 3e civ., 27 octobre 2016, n° 15-22920.
Responsabilité : les désordres n'avaient pas atteint la gravité décennale
Des maîtres d'ouvrage font construire une maison d'habitation. Invoquant l'existence de diverses malfaçons, ils assignent, après expertise, le constructeur et son assureur de responsabilité décennale en indemnisation de leur préjudice. L'expert judiciaire indique que les désordres sont sans gravité. Au vu de ces appréciations techniques, la cour d'appel écarte l'application de la garantie décennale.
L'appréciation de la cour d'appel était-elle fondée ?
Oui. Les maîtres d'ouvrage ne démontraient pas que les dommages avaient atteint, avant l'expiration du délai décennal, la gravité requise par l'. La Cour de cassation rappelle que l'application de la responsabilité décennale est subordonnée à la manifestation de dommages de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage ou à sa destination, pendant la période décennale, sauf en présence d'un désordre évolutif. Mais ce dernier est celui qui, né après l'expiration du délai décennal, trouve son siège dans l'ouvrage où un désordre de même nature a été constaté présentant le caractère de gravité requis par l' et dont la réparation a été demandée en justice avant l'expiration de ce délai (). Les malfaçons, en l'espèce,ne constituaient donc pas un désordre évolutif.