Pointée vers les sommets arrondis et pelés des volcans, la double haie solaire encadre les vaches. Cette vision insolite s’impose au randonneur sur le GR30 – tour des lacs d’Auvergne – lorsqu’il traverse Laqueuille (Puy-de-Dôme).
Des vaches impassibles
Orientés nord-sud pour capter les rayons du matin et de l’après-midi, les panneaux totalisant un potentiel de 100 Kwc ne produisent pas d’impacts négatifs, selon l’Institut national de recherche en agriculture et environnement (Inrae), propriétaire de la parcelle d’environ 1 ha mise à la disposition d’Engie Green. Le détournement des vents et l’ombre n’affectent ni le comportement des génisses de race Prim’Holstein, ni la qualité de l’herbe, concluent les chercheurs, à l’issue de deux saisons de suivi agronomique.
Baptisée Camelia, l’installation pilote d’1 M€ enrichit le panel de solutions agrivoltaïques de l’énergéticien, présentées début juin à l’Association nationale des élus de montagne. Engie Green distingue deux familles d’ombrières : en hauteur, elles trouvent leur place au-dessus des vignes et vergers et se pilotent selon les pentes ; fixes, elles ciblent les élevages ovins, sur des terrains qui restent compatibles avec l’entretien par des engins dédiés à la fauche ou à la fertilisation.
Une solution polyvalente
Les haies solaires bifaciales testées à Laqueuille visent une plus grande polyvalence. Engie Green prépare une seconde installation dans un terrain de grande culture à Villemain (Deux-Sèvres), à partir de septembre prochain.
L’innovation née en Auvergne n’en confirme pas moins une stratégie d’acceptabilité bien rôdée. Outre la priorité à l’agriculture en application de la loi d’Accélération de la production d’énergie renouvelable (Aper), l’énergéticien se coule dans les moules mis en place par les chambres d’agriculture. « Le point de départ ne varie pas : il faut comprendre l’exploitation, avec sa machinerie et ses pratiques », explique Anne Chapulliot, responsable des offres innovantes d’Engie Green.
Montages tripartites
De cette approche, découlent des montages contractuels tripartites. « Au propriétaire, nous proposons des baux emphytéotiques calculés en volume, et cantonnés aux espaces nécessaires à l’installation photovoltaïque, en reproduisant un système courant dans les parkings souterrains.
Cela donne beaucoup de travail aux géomètres. Pour les exploitants signataires de baux ruraux, le partage des revenus peut prendre la forme d’un loyer, d’un contrat de fermage ou d’une convention sur des aides à l’investissement, au fonctionnement ou à l’achat de matériel », détaille Anne Chapulliot.
Redynamisation rurale
En amont de ces contrats, la recherche de consensus passe par le dialogue avec les collectivités. « Avec la commune de Laqueuille et avec le parc naturel régional des Volcans d’Auvergne, de longues discussions ont porté sur l’insertion du projet. Nous avons appris à lire le paysage », témoigne la responsable des offres innovantes d’Engie Green.
L’énergéticien a profité du projet pour partager sa tranchée d’enfouissement avec le réseau aérien du syndicat départemental d’électricité. Une convention avec la commune porte sur le déneigement de l’installation, aux frais de l’exploitant.
Pour Engie Green, le bilan agrivoltaïque de la loi Aper dépasse la production électrique : « Les installations contribuent au maintien de l’activité agricole, grâce à une diversification des revenus. Elles favorisent des projets collectifs, contractualisés avec des groupements d’exploitants », souligne Anne Chapulliot.
